Un logiciel d'ACV libre : openLCA

développement durable 17 juil. 2014

En cette journée humide (je me liquéfie dans mon bureau… CHAUD), je vais vous présenter un logiciel bien sympa et pratique : openLCA. C’est un logiciel libre (licence MPL Mozilla Public License 2.0) et gratuit, conçu pour être simple d’utilisation, efficace, puissant, tout en n’étant basé que sur des briques libres et sur les contributions des utilisateurs. C’est, à mon sens et à ma connaissance, le seul logiciel de cette catégorie qui soit entièrement ouvert. Et en plus, il tourne aussi bien sous Linux que sous Windows. Et Mac OS, aussi, mais bon…

openLCA permet donc de faire de l’analyse environnementale, de l’ACV (Analyse du Cycle de Vie, ou LCA, pour Life Cycle Assessment), et est développé par GreenDelta, un cabinet de consultants allemand spécialisé dans cette thématique. Voyons un peu de quoi il retourne !

 

L’Analyse du Cycle de Vie

Cette démarche n’a rien d’aléatoire, et est clairement encadrée par une série de normes (les ISO 14 04x, en particulier les 14 040 « Management environnemental – Analyse du cycle de vie – Principes et cadre » et 14 044 « Management environnemental – Analyse du cycle de vie – Exigences et lignes directrices ». Ce qu’il faut, donc, c’est un outil capable d’aider à la réalisation d’une ACV, et qui reste dans l’esprit et la méthodologie décrite pas ces normes, histoire que les résultats soient valables.

Pour faire hyper simple :

Etapes-acv
Cadre d’une ACV selon ISO 14 040 — CC-BY 1.0 Wikimedia Commons

(oubliez les numéros des normes ISO du dessin, ils sont faux, ces normes sont obsolètes et remplacées par ISO 14 044 depuis 2006)

Je vais pas aller plus avant dans la définition d’une ACV, ça peut faire l’objet d’un article dédié si certain(e)s sont intéressées. Cependant, sachez juste qu’il faut pouvoir gérer :

  • une unité fonctionnelle, qui définit la fonction/le besoin auquel répond un produit ou service, avec une notion de performance, de durée de vie… C’est pas fait au pif, c’est ce qui permet de comparer 2 produits/services répondant à un besoin identique. Genre pour une machine à laver, on va parler de laver X kilos de linge, à raison de Y cycles de lavage pendant Z années. Donc une machine qui fait 7kg de linge va devoir « compenser » par rapport à une machine qui en lave 18kg… On peut pas les comparer uniquement sur le nombre de cycles, parce que le service rendu n’est pas le même (i.e. laver une certaine quantité de linge) : elles ont clairement pas le même rendement si elles font 1 500 cycles chacune.
  • un gros inventaire des flux entrants/sortants, sur tout le cycle de vie du produit/service : énergie, matériaux, déchets, polluants…
  • une méga base de données comprenant plein de matières, procédés de fabrication, ce dont on a besoin pour les produire, les rejets dans l’environnement…
  • des méthodes de calcul capable de « convertir » votre inventaire en impacts environnementaux, selon plusieurs critères (des indicateurs, plus exactement, comme l’eutrophisation marine, le réchauffement climatique, l’acidification des océans…)
  • et tout un tas d’autres choses indispensables à la cohérence du truc, des calculs d’incertitude, des comparaisons, normalisations, pondérations de résultats…

Bref, largement de quoi faire.

 

 

Et openLCA, dans tout ça ?

Cet outil a été conçu dans le but de coller au plus près aux normes en vigueur. D’un point de vue d’informaticien, il permet aussi à la communauté de l’enrichir, de le maintenir, de le mettre à jour en cas d’évolutions des normes et éléments qui composent une ACV.

Le cycle de vie d'un produit -- Source : SolidWorks - Dassault Systèmes
Le cycle de vie d’un produit — Source : SolidWorks – Dassault Systèmes

openLCA est basé sur Eclipse RCP, un logiciel de la fondation Eclipse, dont l’un des objectifs est de faciliter le développement de logiciels, tout en étant polyvalent et « universel ». Je ne vais pas aller plus avant dans les détails de cette nébuleuse qu’est le projet Eclipse, parce que sans rire, il y a tout un tas de choses à dire, de sous-projets à détailler, etc. Et puis surtout, ça n’est pas le but de l’article, vu que openLCA est indépendant de tout ce petit monde.

 

Bases de données d’inventaire

Dans tout logiciel d’ACV, il arrive un moment où vous devez décrire votre produit le plus fidèlement possible, à l’aide de données fiables. Matières utilisées, procédés d’usinage et de fabrication, mix énergétique… Il y en a tout un tas.

Ces informations, on les trouve dans des bases de données spécialisées, comme ELCD (European reference Life Cycle Database) qui est la base de données européenne (gratuite !) du Joint Research Centre, ou encore EcoInvent (payante) qui nous arrive de Suisse, du centre de recherche du même nom. On a accès à un paquet de bases de données, génériques ou au contraire très spécialisées (comme USDA, axée sur l’agriculture aux Etats-Unis).

Et pour simplifier le tout, les principaux éditeurs de logiciels professionnels d’ACV (SimaPro, de PRé Consultants, et GaBi, de PE International) développent et maintiennent une base de données qui leur est propre.

 

Tout ça, c’est cool. Mais imaginez que vous vous lancez dans une modélisation en utilisant par exemple EcoInvent. Et là, pouf, il vous manque une donnée. Qui se trouve dans la base de GaBi. Vous avez le doigt posé sur un gros souci de l’expert ACV : croiser des données venant de bases séparées et loin d’être compatibles entre elles (ne serait-ce que par leur format, par les unités utilisées…).

C’est là qu’est arrivé openLCA Nexus.

openlca_nexus300

 

openLCA Nexus

Projet intimement lié à openLCA, Nexus se propose de développer un format de stockage et d’échange standard pour les bases de données d’ICV. Du coup, chacune des bases les plus répandues (ou volontaires hein) est accessible et peut être importée en 3-4 clics dans openLCA, sans que vous ayez à vous poser la question d’une unité qui viendrait mettre à mal toute votre étude. Bien sûr, les licences originales des bases sont respectées : EcoInvent reste payante, ELCD reste gratuite, etc.

Mais le concept vaut le détour : openLCA Nexus permet au projet openLCA d’attirer des utilisateurs, parce que performant, relativement simple à utiliser (du moins, on peut faire un minimum, alors que sous GaBi, pardon, mais sans formation, c’est tendu), et surtout lié à plusieurs bases de données de diverses origines.

Alors oui, SimaPro et GaBi permettent d’accéder à plusieurs bases de données, mais rien n’est fait pour le moment pour apporter la cohérence nécessaire à la combinaison de données provenant de différentes sources. Non parce que bon, on rigole, mais ça fait quand même mal au fondement de payer 2 500€ (oui oui) d’abonnement à EcoInvent si c’est pour se retrouver avec des données incompatibles avec un projet entamé avec la base GaBi… 😉

 

Et à quoi ça ressemble ?

Ben… à tout logiciel d’ACV, plus ou moins. Relativement simple à appréhender, toutes les fonctions des grands, avec au moins autant de paramètres, et évidemment autant de possibilités pourvu que vous ayez les données (payantes ou non) qui vont bien.

Quelques captures d’écran, tout de même ! 🙂

Avouez qu’avec un tel outil, ce serait triste de se priver et de ne pas s’y mettre, non ? :mrgreen:

Mots clés